La violence

Publié le par Christophe Leconte

LA VIOLENCE

INTRO:

Multiplicité des formes de violence.

Brutalité agression, exploitation, harcèlement etc.

La brutalité n'est qu'une des formes de la violence.

Violence pas force: force n'est qu'une donnée neutre.

 

 

I VIOLENCE ET AGRESSIVITE

 

1/ constat d'une agressivité constitutive des relations humaines.

Si on considère comme Rousseau que l'homme à l'état de nature est solitaire, la violence paraît être évincée de la nature de l'homme à l'état de nature "errant dans la nature sans industrie, sans parole, sans domicile, sans guerre et sans liaison, sans nul besoin de ses semblables comme sans nul désir de leur nuire... " Discours sur l'origine de l'inégalité...

SI il y a des rencontres mêmes agressives, elles sont limitées

- dans leur ampleur: Elle ne signifient rien d'autre qu'elles mêmes " que la joie ou la peine d'une bonne et d'une mauvaise fortune "

- Dans leur contagion:

La vengeance est évincé: on peut se faire beaucoup de violence mais jamais d'offense.

Mais dès qu'une société s'établit la violence est la présente.

" Dans le premier cas ils usent de violence pour se rendre maître de la personne d'autres hommes, de leurs femmes, de leurs enfants, de leurs biens. Dans le deuxième cas pour défendre ces choses. Dans le 3ème cas, pour des bagatelles, par exemple pour un mot, un sourire, une opinion qui diffère de la leur." Hobbes Le Léviathan.

La cause de la violence sociale: La propriété:

"Le premier qui, ayant enclos un terrain, s'avisa de dire ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile. Que de crime, de guerres, de meurtres, que de misères et d'horreurs n'eût point épargné au genre humain celui qui, arrachant les pieux ou comblant un fossé, eût crié à ses semblables: Gardez vous d'écouter cet imposteur; vous êtes perdus, si vous oubliez que les fruits sont à tous, et que la terre n'est à personne. "

Rousseau, Discours sur l'origine de l'inégalité

La violence semble donc être au coeur de toutes les relations entre les hommes.

Constations même d'une violence inhérente à tout groupe humain même animal: " La réaction agressive provoquée par la proximité de trop nombreux voisins n'a rien à voir avec la culture et ne peut dure être influencée. Le besoin d'espace, de territorialité est un facteur inné : l'observation prouve que la charité humaine disparaît lorsque les hommes vivent trop serrés. L'homme n'est pas totalement conditionnable." Konrad Lorenz, entretien in L'Express 1/6/70.

 

2/ Constat d'une agressivité inhérente à la vie.

Toute vie est agressive: " Vivre est essentiellement dépouiller, blesser, violenter le faible et l'étranger, l'opprimer, lui imposer durement ses formes propres ou, tout au moins ( c'est la solution la plus douce) l'exploiter. Nietzsche Par delà le bien et le mal.

 

3/ L'agressivité n'est pas la violence

a) La violence n'est pas la pulsion de vie

- Toute pulsion tend à restaurer un état antérieur Les pulsion de vie tendent à restaurer une unité perdue.

- Mais si l'on suppose que l'être vivant n'est apparu qu'après la matière inanimée, la pulsion de mort serait une tendance à ramener l'organisé à l'inorganisé, l'animé à l'inanimé, le vivant au mort. CF. Freud abrégé de Psychanalyse.

-Si l'agressivité est assimilation, pour forger une plus grande cohérence, la violence est destruction, ce que l'on retrouve même chez l'individu dans les volontés d'auto destruction.

 

b) De plus l'agressivité peut se retrouver dans des formes contraires à la violence.

- Sur le plan international l'agressivité s'oppose à la violence qui réclame la destruction de l'autre ( le génocide ) ou son exploitation totale ( le capitalisme )

Ce que contredisent et un colonialisme ( qui n'a pas de valeur pour autant ) et une agression économique ( qui implique une maîtrise de ses propres paramètres ):

" Presque tous les partis comprennent qu'il va de leur propre intérêt que le parti adverse ne s'étiole pas trop." Nietzsche Crépuscule des idoles

- Sur le plan personnel on peut opposer la violence autodestructrice à la fécondité de l'agressivité:

L'agressivité la plus haute n'est pas une agressivité physique mais une agressivité spirituelle, la victoire sur ses propres contradictions, de celui qui aime les contradictions pour

pouvoir les vaincre: " On n'est fécond qu'à condition d'être plein de contradiction " " Rien ne nous est plus étranger que le voeu qu'on nourrissait autrefois, typiquement chrétien de "la

paix de l'âme " Nietzsche ibid

L'agressivité n'est pas la violence, elle doit être transformée non éliminée, dans ses formes les plus hautes l'agressivité travaille dans le sens de la vie. La violence, elle doit être combattue, reste à savoir par quels moyens.

 

II COMBAT DE LA VIOLENCE.

 

1) Le droit

Le droit semble s'opposer à la violence, il semble substituer au conflit son règlement par des lois. Il n'est cependant pas une garantie suffisante:

- Origine du droit:

Non pas un constat établi pour le bien de tous mais l'institutionnalisation de l'injustice, la confiscation des richesses par une minorité, la confirmation de leur puissance par les lois et un état, l'état qui garantit la propriété de ceux qui ont tout alors que d'autres n'ont rien et qui punit le voleur. La légitimation de la violence économique est la continuation de la violence par d'autres formes, non son éviction du corps social. Cf. Rousseau: le contrat social n'est pas le pacte social.

- Application: le châtiment.

Pas origine logique mais magique: le crime blesse telle société primitive dans ce qu'elle a de sacré. Il faut détruire le crime, faire en sorte qu'il n'ait pas eu lieu.

Impos. réellement, mais possible magiquement -> Détruire le symbole du crime ( par exemple procéder à une cérémonie pour brûler l'arme du crime).

Dans le cas d'une attaque de l'état par un individu, -> Manif. de l'incommensurable puissance de l'état sur l'individu, ultra violence de l'exécution publique La seule valeur de la violence étatique, de la punition, serait une mise hors d'état de nuire, ou une vertu rééducation, avec

prudence Cf. les camps de rééducation et Orwell.

Seules les lois fondées sur la raison, c'est à dire conformes à l'intérêt commun dans un état juste, qui ne ferait pas qu'être un cadre au maintien de l'injustice et à l'intérêt de quelques

uns mais réaliserait l'intérêt général ( ce qui suppose plus de lois dans le domaine économique) pourrait s'opposer à la violence.

Dans l'état actuel, l'état parvient au moins à contenir les manifestations brutales de la violence par la force et le pouvoir légal de contrainte. mais ce pouvoir est limité à l'intérieur des états

 

2 limites du droit dans la gestion de la violence: la guerre.

 

Ne se traduit pas par un conflit armé: " La paix n'est pas une absence de guerre " cf. la guerre économique, pas seulement agressivité qui suppose le maintien de l'autre mais violence destructrice génératrice de conflits armés.

Seule solution: l'existence d'un droit international dont l'existence est subordonné à une condition difficilement réalisable: que les auteurs mêmes de la violence et les détenteurs d'une hégémonie trouvent exorbitant à payer le prix d'une violence qui le touche peu.

 

3) Evolution de la réaction face à la violence.

La seule solution historique envisagée contre la violence fut la violence. Toute civilisation porte dans ses mythologies ou dans son histoire, l'histoire d'une violence collective réduite par le recours à un sacrifice.

D'où peut venir ce recours à la violence pour résoudre une crise.

Hypothèse de Girard dans le bouc émissaire: Ce recours vient d'une constatation faite aux premiers ages. Lors d'une violence collective, la mort d'un des plus faibles entraînait une stupeur animale qui mettait fin à la violence. Ces crises d'hystérie collective existent aussi chez les grands singes et se termine également par la mort d'un petit.

La solution pratique qui fut envisagée pour mettre un terme à toute violence collective fut donc donnée par l'expérience et étendue à toute crise sociales; en cas de difficulté grave la solution se trouve dans la mise à mort qui présente des caractéristiques victimaires.

- L'étranger: Guillaume de Machaut qui attribue la peste de 1350 aux juifs.

- La difformité ou la fragilité physique: Les thébains attribuent la peste à Oedipe boiteux.

- La différence.

Les accusations aussi présentent un certains nombre de points communs:

Il s'agit toujours de dénoncer les crimes qui transgressent les tabous les plus rigoureux relativement à la culture considérée.

La logique de l'accusation est simple puisqu'on est en présence d'une situation qui brise l'ordre social ( une crise comme la terreur en France ou la Peste brise tout ordre social ) il faut donc qu'il y ait justement un coupable de cette brisure. Ce coupable aura donc forcément commis un crime qui attaque l'ordre social à sa base.

Les juifs sont accusés de profaner des hosties

Les premiers chrétiens sont accusés de manger les enfants

Oedipe est accusé du meurtre de son père et d'inceste.

L'intérêt de ce sacrifice est de servir de soupape à une société donnée et surtout de neutraliser la vengeance en assurant le meurtre de la victime émissaire par l'ensemble de la population cf. les exécutions collectives: la lapidation ou tout un peuple qui s'assemble pour pousser la victime dans un précipice ou même les exécutions où l'on expose les victimes afin que tous participent.

Si tous ont participé au crime une vengeance est impossible.

Mais les débordements sont fréquents voire dramatiques et une solution plus moderne serait

souhaitable. Dérive politique: "il vaut mieux qu'un seul meure plutôt que beaucoup.

- Solution: rompre avec ce reflex de recours à une victime émissaire. C'est ce que selon Girard ont tenté de faire les évangiles. Ce que la mort de Jésus a d'extraordinaire ce n'est pas

son exécution passive ou même son acceptation. Ce qu'il y a de singulier c'est le sens qui y est donné. C'est le repérage du mécanisme inconscient de désignation de la victime émissaire.

L'insistance sur l'innocence de Jésus cherche moins selon Girard à montrer la " bonté " de Jésus qu'à souligner le fait que toute désignation de la victime émissaire est infondé.

De même le pardon demandé à Jésus pour ses exécuteurs et surtout pour ceux qui le désignent comme victime n'a pas le sens d'une bonté supérieure il insiste surtout sur le fait que le processus est inconscient: " ils ne savent pas ce qu'ils font."

 

Conclusion:

La violence n'est pas à confondre avec la force ou l'agressivité qui suppose le maintien de l'adversaire et dans sa plus haute manifestation le progrès intellectuel et humain dans la lutte

contre les contradictions recherchées pour être vaincues. La violence contient en germe une puissance destructrice et auto destructrice contre laquelle un état dont l'origine, la pratique, la tendance à servir une idéologie, n'est pas toujours une garantie suffisante.

 

Publié dans Cours

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